Dans un discours de 45 minutes très attendu, le président Emmanuel Macron a fait le choix d’alterner entre le français et l’anglais dans son discours au forum économique de Davos. L’occasion pour le chef de l’État français de faire passer des idées très différentes suivant la langue employée.

Au forum économique de Davos le 24 janvier 2018, Emmanuel Macron s’est exprimé pendant un peu moins d’un heure, alternant entre le français et l’anglais lors de son discours. Un moyen pour le président français de tenir des propos très sensiblement différents d’une langue à l’autre.

Le français a été pour le chef d’État l’occasion de s’afficher comme un président attentif à la question sociale et cherchant à protéger la nation française des nuisances de la mondialisation et à surveiller la finance mondiale.

Des éléments de langages tels que «le devoir de partager», la «crise du capitalisme», se sont ainsi glissés dans cette partie du discours, lui donnant l’occasion d’insister sur la nécessité d’apporter une protection accrue en matière sociale et climatique.
Renouant avec son passé socialiste, le président a dénoncé une croissance «structurellement de moins en moins juste» et a appelé à «arrêter de détricoter le droit social». Il a réclamé un « nouveau contrat mondial » face à une mondialisation « qui tire le monde vers le bas« .

Il explique ensuite que «beaucoup de citoyens rejettent la mondialisation car un lien s’est perdu entre le progrès économique et la justice sociale» et souligne «les contradictions du capitalisme mondialisé et le malaise qui en est sorti»

Les gouvernements devraient eux avoir des « stratégies fiscales coordonnées au niveau international« , notamment pour taxer les géants du numérique « qui ne paient pas d’impôts« , a dit le président français.

 

Changement de langue, changement de ton en anglais

Emmanuel Macron a opté pour un discours aux accents bien plus libéraux, soucieux de montrer aux représentants des grandes entreprises mondiales qui composaient une grande partie de son auditoire que la France mettait tout en oeuvre pour les accueillir. Tant et si bien qu’il s’en est pris au modèle social français, estimant que celui-ci avait «affaibli l’attractivité et la croissance» du pays sans lutter contre les inégalités.

Les éléments de langage ont alors pris une tournure différente, puisqu’il était désormais question de «garantir la stabilité pour les entrepreneurs et les investisseurs», de «flexibilité», ou encore de «changer de business model pour se réadapter à l’environnement».
L’ex-banquier d’affaires de Rothschild a rappelé que la France avait adopté une profonde réforme du droit du travail, notant qu’elle engendrait une «baisse du coût du travail et du capital».

Diminution de l’impôt sur les sociétés, mise en place d’une « flat tax sur le capital »… « France is back ! », s’est exclamé le président français.
« La France est réconciliée avec la mondialisation, l’économie, le succès », a ajouté le chef de l’Etat dans un entretien à la télévision suisse RTS.

Un double discours qui n’a visiblement pas dérangé les chefs d’Etats et grands patrons présents dans le public, qui ont accordé une standing ovation au président français au terme de son intervention. Qui s’est conclue en anglais.

Celui qui connaît bien Davos, où il était déjà venu en janvier 2016 en tant que ministre de l’Economie de François Hollande, avait alors multiplié les rencontres avec des grands patrons et enchaîné les interviews en anglais auprès des grandes chaînes américaines.

Selon l’économiste américain Dennis Snower, cité par le journal allemand, “Macron avait quelque chose de Tony Blair : Blair avait fasciné avec sa ‘troisième voie’ mais, en fin de compte il ne compte guère d’avancées concrètes à son actif”. Une expérience que Macron pourrait vivre dans quelques années, suggère Die Welt.

Souhail Ftouh

 

 

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