Malgré la menace sur son territoire, un hôpital dans le nord d’Israël continue de soigner des syriens gravement blessés, ainsi que des enfants provenant de la frontière.
Plusieurs dizaines de citoyens syriens grièvement blessés ont été admis dans cet hôpital, certains avaient des blessures à la tête, similaires à des éclats d’obus ou des blessures par balles.
Jérusalem a déclaré une politique de non-intervention militaire dans le conflit syrien, mais a permis l’aide humanitaire comme le traitement médical. Près de 600 syriens qui ont été blessés dans les combats ont été pris en charge dans les hôpitaux israéliens depuis le début du soulèvement contre le président syrien Bachar al-Assad en mars 2011.
Israeli medical personnel care for wounded Syrian children
Fatima a été blessée dans le bombardement de sa ville natale de Deraa, dans le sud de la Syrie. Admise fin juillet à l’hôpital Ziv de Safed, elle ne tarit pas d’éloges sur le personnel médical israélien.
« Ils font preuve de beaucoup de respect à notre égard. Que Dieu les protège », dit-elle, assise sur son lit, a deux pas de celui de sa fille âgée de 8 ans, elle aussi blessée.
Mais cette mère de neuf enfants, âgée de 41 ans, ne parvient pas toujours à cacher sa nervosité à l’idée d’être associée avec Israël, un pays techniquement en guerre avec la Syrie depuis les guerres de 1967 et 1973.
Craintive, elle a demandé à ce que des pseudonymes remplacent son nom et celui de sa fille pour qu’elles ne puissent être identifiées.
« S’il-vous plaît, ne montrez pas nos visages », a-t-elle aussi demandé au photographe de l’AFP.
Fatima fait partie des plus de 600 Syriens hospitalisés en Israël, la plupart dans les hôpitaux de Safed et de Nahariya.
Selon le directeur adjoint de l’hôpital de Safed, Calin Shapira, environ un million de dollars ont été alloués par le gouvernement israélien pour le traitement des blessés syriens.
Fatima dit ne pas savoir comment elle est arrivée en Israël:
« L’explosion m’a complètement assourdie. J’ai été assommée et je ne me souviens plus comment je suis arrivée ici ou qui m’a évacuée. Je me souviens juste que des gens m’ont aidée à me relever et après je me suis retrouvée ici, dans un hôpital israélien », explique-t-elle.
Selon les médecins, Fatima, touchée à la cheville souffre « d’un sérieux traumatisme lié à l’explosion avec perte de tissu et d’os » tandis que sa fille est atteinte de fractures multiples aux deux jambes.
Leur voisine de chambre, âgée de 15 ans, elle aussi originaire de Deraa, a eu moins de chance et a perdu ses deux jambes dans un bombardement.
Dans le service de soins intensifs, juste à côté de la chambre des trois femmes, est allongé un jeune Syrien, une balle logée dans l’estomac.
Mais malgré la montée de la tension entre les deux pays, tous les Syriens qui arrivent dans l’établissement sont soignés, explique le directeur adjoint de l’hôpital Ziv.
« Peu importe d’où ils viennent. Nous les accueillons à l’hôpital et les traitons avec compassion. Un des principes de la profession médicale est de venir en aide, indépendamment de toute autre considération », explique Calin Shapira.
« La plupart des blessés en provenance de Syrie sont des civils innocents, dont de nombreuses femmes et enfants, qui n’ont pas participé aux combats », ajoute-t-il, précisant qu’ils sont acheminés jusqu’à l’établissement par l’armée israélienne.
« Nous ne savons pas d’où ils viennent ou qui ils sont. La seule chose que nous savons c’est qu’ils ne faisaient pas partie des forces d’Assad », poursuit-il.
L’armée israélienne a indiqué avoir évacué des dizaines de Syriens blessés, autorisés pour des raisons humanitaires à franchir la ligne de cessez-le-feu entre Israël et la Syrie au point de passage de Qouneitra, vers l’hôpital Ziv, situé à une quarantaine de kilomètres de là.
« Lorsqu’ils peuvent quitter l’hôpital, les Syriens sont de nouveau confiés à l’armée qui les ramène en Syrie mais je ne sais pas où », précise M. Shapira.
Certains syriens blessés n’entrent cependant pas en Israël, mais bénéficient plutôt d’un traitement à la frontière entre les deux pays, dans le plateau du Golan.
Fatima redoute tous les bombardements, avec ou sans utilisation d’armes chimiques.
« Tout le monde a peur de toutes les sortes de bombardements et de frappes (par le régime) qui se poursuivent maintenant depuis longtemps », dit-elle. « Nous voulons juste que cela soit fini quand nous rentrerons à la maison ».
Pour l’instant le Golan reste largement calme, bien que quelques obus de mortier syriens s’égarent occasionnellement. L’assistance médicale aux syriens blessés devrait se poursuivre, et l’identité des patients reste étroitement surveillée afin qu’ils ne soient pas menacés en rentrant chez eux, comme conséquence de l’hostilité envers Israël toujours présente.
Israël est sur le qui-vive dans l’éventualité d’une intervention militaire étrangère en Syrie qui pourrait provoquer des débordements dans l’Etat hébreu. Le cabinet de sécurité a ordonné, mercredi, le rappel d’un millier de réservistes affectés à la défense antimissile du pays.
Souhail Ftouh