Apres la décision anti-juive de la Haute cour administrative égyptienne qui a statué pour déchoir de leur nationalité les Egyptiens mariés à des femmes Israéliennes, la justice de ce pays arabe vient de s’attaquer aux fidèles de la minorité chrétienne orthodoxe. La justice égyptienne vient d'ordonner à la très conservatrice Église copte du pays d'autoriser le remariage.
Une cour égyptienne vient d'ordonner à l'Eglise copte d'autoriser ses fidèles divorcés à pouvoir se remarier. «Conformément à la loi, un chrétien peut se remarier et la Constitution lui garantit le droit de fonder une famille. (Par conséquent), l'appel du patriarche Chénouda pour empêcher les coptes de se remarier est rejeté», a déclaré la Haute cour administrative, en précisant qu'il n'y a plus d'appel possible (1)
C'est Hani Wasfi, un fidèle de l'Eglise copte qui est à l'origine de l'affaire. Divorcé et désireux de se remarier, il a été rapidement confronté au refus de Chénouda III. Hani Wasfi décide alors de déposer une plainte. Débouté en première instance, le patriarche s'était pourvu en appel devant la Haute cour.
L'Eglise copte a rejeté en bloc la décision de justice. Le patriarche de l'église Le pape Chénouda III de l’Eglise copte orthodoxe a rejeté le verdict de la Haute Cour administrative qui autorise le remariage des coptes ayant obtenu le divorce dans les tribunaux civils. Ce verdict est considéré comme une ingérence dans les affaires de l’Eglise.
« Personne ne peut nous contraindre à une décision quelconque. Nous sommes tenus par les instructions de l’Evangile. Le verdict de la Cour administrative a un caractère civil. Or le mariage est un acte religieux qui doit se faire dans le respect de la loi religieuse » (2)
C’était la réponse du pape Chénouda III de l’Eglise copte orthodoxe à la Cour administrative qui a autorisé le 29 mai dernier le remariage des coptes ayant obtenu le divorce dans les tribunaux civils, mais à qui l’Eglise refuse le remariage, car ne reconnaissant pas leur divorce ou parce que leur situation ne le permet pas selon les préceptes de l’Eglise.
L’Eglise copte orthodoxe respecte des règles très strictes en matière de divorce et de mariage. Elle s’oppose au divorce sauf en cas de contraction d’une maladie grave par l’un des époux ou en cas de conversion de l'un des conjoints à une autre religion ou branche du christianisme. Selon sa doctrine, l'église copte ne permet le divorce qu'en cas d'adultère prouvé. Dans ce dernier cas, seule la partie n’ayant pas commis l’adultère est autorisée à se remarier.
L’Eglise a fait savoir qu’elle n’était pas disposée à renoncer à ces principes. « Aucun prêtre ne peut marier un copte sans l’autorisation de l’Eglise copte orthodoxe et s’il le fait, nous allons le destituer », a prévenu le pape .
Le pape Chénouda III a fait savoir que l’Eglise va présenter un recours devant la Haute Cour constitutionnelle. « Si la Constitution donne le droit au citoyen de se remarier, elle doit aussi donner le droit à l’Eglise d’appliquer ses principes », a annoncé le pape.
L'Egypte, en grande majorité musulmane, compte près de 10% de coptes, ou chrétiens d'Egypte qui sont opposé à l’ingérence de la justice dans les questions de la foi chrétienne. Le mariage civil n'est reconnu en Egypte que s'il est s'accompagné d'un mariage religieux.
Ramsis Al-Nagar, avocat de l’Eglise copte orthodoxe, monte au créneau contre le verdict de la Haute Cour administrative. Selon lui, l’Eglise n’est pas une instance administrative pour qu’elle soit obligée d’appliquer un tel verdict. « C’est une instance religieuse spirituelle qui respecte uniquement les principes divins et non pas les verdicts humains », lance Al-Nagar. Et d’ajouter que l’Eglise n’appliquera pas le verdict car « l’Evangile refuse le remariage de la personne divorcée pour adultère. Le tribunal ne peut pas obliger l’Eglise à appliquer ce verdict ». Kamil Sediq, secrétaire général du Conseil communautaire copte, va encore plus loin. Selon lui, les juges n’ont pas respecté un principe très important de l’islam, à savoir qu’un juge musulman doit trancher les affaires relatives aux chrétiens en se basant sur leurs principes. Même son de cloche pour père Ibrahim, de l’Eglise de la Vierge Marie à Daher, pour qui la justice ne doit pas intervenir dans les affaires religieuses et l’islam reconnaît le droit des non-musulmans à appliquer les instructions de leur propre religion.
Selon Mirande Youssef , un journaliste égyptien d’AL-AHRAM Hebdo « c’est l’absence d’une loi unifiée sur le statut personnel copte qui est à l’origine de cette confusion entre les lois civiles et celles de l’Eglise. Car dans un tel contexte, les juges appliquent les lois civiles. »
Pour lui il est logique que les chrétiens jouissent du même droit s’agissant du mariage chrétien considéré comme sacré et il doit y avoir une loi sur le statut personnel copte
Selon l’Eglise également, c’est ce vide juridique qui pousse les coptes à faire appel à la loi musulmane de statut personnel. Pour remédier à ce problème, l’Eglise a élaboré un projet de loi sur le statut personnel applicable aux différentes confessions chrétiennes. Toutes les Eglises ont accepté cette loi en 2006, mais le projet est toujours dans les tiroirs du ministère de la Justice. Georgette Qellini, députée du Parti National Démocrate (PND, au pouvoir), explique : « Certaines lois examinées au Parlement, telles que la loi sur le statut personnel, ne sont promulguées que si elles obéissent aux principes de la charia. » (2).
La bataille du mariage pour les coptes divorcés ne sera donc résolue que si les principes de la charia permettront la promulgation d’une loi sur le statut personnel de cette minorité. En attendant la foi copte orthodoxe fera l’objet violation. En fait Le gouvernement du Caire refuse de traiter des problèmes de longue date qui sont à l’origine de l’intensification de la discrimination à l’égard des Coptes et d’autres groupes.
Ftouh Souhail, Tunis
(1) Source: Actu chrétienne
(2) Source : AL-AHRAM Hebdo