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Azzmi, 8 ans, boite le long des couloirs de la clinique Hussein, au cœur d’Amman, en attendant de faire une radio. Ce petit palestinien raconte aux médecins qu’il est tombé du toit de sa maison. « Qu’en est-il du bleu sur ton dos ? » demande une infirmière, qui reconnait l’enfant. « Quand je suis tombé sur le sol, une pièce de métal a heurté mon dos » a répondu Azzmi. C’est la cinquième fois cette année que ce garçon visite l’infirmerie pour recevoir des soins médicaux, a dit l’infirmière, qui parle à la presse sous couvert d’anonymat. La clinique est gérée par l’Office de Secours et de Travaux pour les Réfugiés Palestiniens au Proche Orient (UNRWA), un organe de l’ONU. Les patients qui viennent dans cette petite clinique sont soit des résidents du camp Squalid Al Hussein soit ils proviennent des quartiers surpeuplés voisins dans la partie orientale d’Amman.
Les palestiniens manquent des services municipaux de base et l’infrastructure est usée ; ils offrent une toile de fond incongrue pour les quartiers snobs de Amman. « Je sais qu’il ne dit pas la vérité parce que ses blessures portent la marque de sévices physiques mais en informer la police ou référer l’enfant aux services sociaux ne ferait qu’aggraver le problème » a dit l’infirmière. « Le garçon ne nous dit pas la vérité sur l’origine de ses blessures car il pense que le dire à la police ne ferait qu’amplifier son problème avec sa famille. » Le personnel de santé travaillant dans les hôpitaux gérés par le gouvernement Jordanien et l’UNRWA reçoivent une formation poussée de l’ONU pour l’enfance (UNICEF) sur la manière d’identifier les blessures liées à la violence.
Idéalement, les enfants maltraités sont inscrits à l’hôpital le plus proche pour plus d’investigations. Dans les cas graves, les policiers sont informés et les enfants sont envoyés à des centres de soins mis en place par le gouvernement Jordanien ou des ONG. Les médecins et le personnel des cliniques préfèrent traiter les cas de violence discrètement. Les parents sont convoqués dans des centres de santé pour être éduqué sur les façons "d’éviter la violence lorsqu’il s’agit d’enfants". « Les parents ont tendance à être plus réceptifs lorsqu’on leur parle directement. Impliquer le gouvernement ou la police pourrait se retourner contre l’enfant», dit un médecin du centre de santé pour les palestiniens de Baquaa, il a également refusé d’être nommé.
Des experts pour enfants en bas âge ont admis que dans un pays tribal comme la Jordanie, il est difficile de mettre en œuvre des programmes de protection de l’enfance en suivant les règles normales. Les responsables de l’UNICEF sont au milieu d’une campagne de sensibilisation visant les "camps de réfugiés" pour faire la lumière sur les droits des enfants. Maha Hemsi, le responsable du projet de protection de l’enfance et de la petite enfance à l’UNICEF, dit que la campagne porte ses fruits et que plus de citoyens semblent se manifester, par rapport à la précédente campagne. La campagne est financée par l’Union Européenne (UE) avec un coût est de 200.000$, elle a pris fin mi-2007, mais Hemsi espère que des efforts similaires se reproduiront. « Nous faisons de notre mieux pour briser le mur du silence qui entoure la violence envers les enfants et leur maltraitance parmi les réfugiés.
Ce n’est pas facile, mais nous faisons des progrès » affirme Hemsi, qui insiste sur le fait que malgré le fait que le nombre de cas signalés a encore augmenté, cela n’est pas nécessairement le signe d’une augmentation des cas d’abus. Des experts dans le domaine ont exprimés leur préoccupation face à la hausse du nombre de cas signalés, en effet, ils ont plus que doublé passant de 661 en 2001 à 1423 en 2004. Selon Zina Khoury, directeur du développement au centre pour la sécurité des enfants "Dar Al-Aman", « le chiffre est probablement plus élevé, car de nombreux cas ne sont pas signalés ». Dar Al-Aman, qui est opérationnel depuis 2002, propose des services psychologiques, médicaux, sociaux et des services éducatifs aux enfants maltraités et à leurs familles.
« Les familles et les enfants sont de plus en plus conscients de leurs droits et de la nécessité d’arrêter les abus, par conséquent, plus de cas émergent » a dit Hemri. Des fonctionnaires de l’UNRWA disent qu’ils œuvrent sans relâche à promouvoir les droits des enfants palestiniens, en ciblant les communautés locales et les étudiants ainsi que les enseignants des écoles publiques.
Nous essayons d’apprendre aux enfants le concept de résolution des conflits et de la tolérance, à travers les programmes scolaires, explique Mattar Saqer, un porte parole de l’UNRWA à Amman. Il admet que l’organe de l’ONU manque de chiffres précis sur la maltraitance des enfants en raison de l’absence d’enquêtes au porte à porte. Il a déclaré que les administrations des écoles sont encouragées à établir des contacts directs avec la population locale par le biais de conseils d’élèves pour aider les familles ainsi que la société en général à comprendre la gravité de la maltraitance des enfants.
Il n’y a pas de document officiel sur l’ampleur du problème de la maltraitance des enfants chez les palestiniens, mais les spécialistes jugent que le taux de mauvais traitements infligés chez les palestiniens est plus élevé que partout ailleurs dans le royaume de Jordanie. « Les enfants palestiniens souffrent le plus en raison de la détérioration des conditions de vie. Ces endroits sont très encombrés avec un pourcentage élevé de chômage. » admet Hemsi.
L’année prochaine, l’UNICEF, en coopération avec le Ministère Jordanien de l’Enseignement Supérieur, le Ministère de la Santé ainsi que d’autres ministères, lanceront une campagne nationale pour documenter la maltraitance des enfants avec comme but de s’attaquer aux racines du problème. « Une fois que nous aurons une idée claire de l’ampleur du phénomène, pourquoi cela se passe t il et quelles sont les circonstances qui l’entoure, il sera plus facile d’élaborer des programmes pour s’attaquer au problème de la violence » explqie Hemsi. Les leaders palestiniens dans les camps croient que le remède à la violence et à la maltraitance des enfants palestiniens est simple, améliorer leurs conditions de vies et leur fournir des emplois. « Nous avons besoin de meilleurs services.
Le taux de chômage est élevé et la pauvreté est en augmentation. Il devient donc tout naturel que les gens soient frustrés et aient tendance à recourir à la violence pour résoudre leurs problèmes », dit Walid Abou Salem, un chef tribal palestinien de Baqaa.