Les travaux de construction du futur bâtiment abritant l’ambassade d’Israël à Rabat ont repris, selon des documents officiels et des observations effectuées sur le site. Après une période d’interruption, le chantier a retrouvé son activité confirmant ainsi la volonté des autorités israéliennes d’installer une représentation diplomatique permanente dans la capitale marocaine.

D’après un titre foncier émanant du conservateur de la propriété immobilière de l’arrondissement Agdal-Riyad, le terrain concerné, enregistré sous le numéro 65534/R et désigné sous l’appellation Afrah, se situe dans le quartier huppé de Souissi, au cœur de Rabat. S’étendant sur une superficie de 18 ares et 39 centiares, la propriété comprend une villa d’un seul niveau, agrémentée d’un jardin et d’un puits. Le document atteste que ce bien relève officiellement de la propriété de l’État d’Israël.

Cette reprise des travaux intervient dans un contexte diplomatique où les relations entre Rabat et Tel-Aviv, rétablies en décembre 2020, continuent de progresser. L’installation d’une ambassade en bonne et due forme viendrait consacrer l’évolution de ces liens bilatéraux déjà marqués par une coopération accrue dans plusieurs domaines, notamment la défense, l’économie et la technologie.

Jusqu’à présent, la représentation israélienne au Maroc s’opérait depuis un bureau de liaison diplomatique, structure provisoire mise en place en attendant le parachèvement du projet immobilier en cours. Si l’aboutissement de ce chantier marque une nouvelle étape dans l’ancrage de la présence israélienne au Maroc.

Depuis la normalisation de leurs relations diplomatiques en décembre 2020, le Maroc et Israël ont renforcé leurs liens économiques. Cette dynamique a ouvert de nouvelles perspectives de coopération dans différents secteurs, notamment le tourisme, les hydrocarbures, les énergies renouvelables, l’agriculture et les nouvelles technologies.

Les premiers vols commerciaux directs entre Israël (comptant près d’un million de citoyens d’origine marocaine) et le Maroc ont été instaurés en juillet 2021, et des accords de coopération avec l’Office national marocain du tourisme (ONMT) ont été signés afin de renforcer les connexions aériennes entre les deux pays. C’est pourquoi, en 2022, le Maroc a accueilli près de 200 000 touristes et voyageurs d’affaires israéliens, soit quatre fois plus que sur la période pré-Covid. Le tourisme représente en effet un secteur déterminant pour les relations entre les deux pays et emploie près d’un Marocain sur cinq.

Parmi les autres indicateurs du réchauffement des relations Maroc-Israël, la coopération en matière de recherche et d’exploitation d’hydrocarbures et le développement des partenariats dans les secteurs de l’énergie renouvelable et de l’eau sont à noter. Il y a un an, le groupe israélien Gandyr, via sa filiale Marom a signé un accord avec Gaia Energy Maroc fixant pour objectif un investissement significatif dans le secteur de l’énergie en 2023-2025.

Par ailleurs, l’un des leaders mondiaux du secteur de l’irrigation, la société Nétafim, seule société israélienne présente officiellement au Maroc depuis plusieurs décennies, vient tout récemment d’inaugurer une unité de production à Kénitra.

Plusieurs entreprises israéliennes portent également un grand intérêt pour les projets engagés dans le domaine de l’approvisionnement en eau. C’est le sens de l’alliance nouée en novembre 2022 entre les responsables de l’Office national de l’électricité et de l’eau (Onee) du Maroc et de la Compagnie nationale des eaux de l’Etat d’Israël (Mekorot), qui prévoit la réalisation d’actions de coopération dans le domaine du dessalement de l’eau de mer, sur le plan de la recherche, du développement et du renforcement des capacités. En Israël, 85 % des eaux usées étaient recyclées en 2022 et près de 80 % de l’eau potable consommée en Israël est fourni par cinq usines de dessalement d’eau de mer (selon des estimations officielles). Une tendance dont souhaite s’inspirer le Maroc pour atteindre un taux d’épuration de l’eau de 80% en 2050.

À noter que l’Office National des hydrocarbures et des Mines du Maroc (ONHYM) a également signé un accord fin 2021 avec la société Ratio Gibraltar, filiale de la compagnie pétrolière israélienne Ratio Petroleum. Cet accord porte sur la mise en œuvre de travaux de recherches d’hydrocarbures et de gaz au large de Dakhla. Ratio Petroleum détiendra 75 % des droits dans les futures licences (les 25% restant revenant à l’Etat marocain) dans une zone de 109 000 kilomètres carrés.

Sur le plan du commerce et des investissements, les deux pays portent l’ambition de quadrupler leurs échanges commerciaux pour les porter à plus de 500 millions de dollars par an. De nombreuses visites d’officiels et de membres du gouvernement israélien à Rabat depuis 2022 ont confirmé le rapprochement économique entre les deux Etats. En ce sens, le ministre marocain de l’industrie et du commerce a souligné que les accords commerciaux signés prévoient notamment des discussions pour la création de zones industrielles au Maroc, une coopération entre les secteurs privés des deux pays et l’échange d’expertise dans le domaine de l’innovation.

Souhail Ftouh

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