Les services secrètes israéliens auraient débuté une opération complexe en Syrie pour le rapatriement de la dépouille de Eli Cohen, démasqué et pendu en 1965 à Damas. Pour le moment, la dépouille de l’illustre espion, élevé au rang de héros en Israël, n’a pas encore été trouvée.
Il semble bien que le « temps opportun » soit arrivé : la chute du régime du clan al-Assad, qui régnait sur la Syrie depuis 54 ans, à la suite d’une attaque fulgurante des forces rebelles islamistes de l’Hayat Tahrir al-Cham, est une opportunité unique pour retrouver ce héros national israélien.
Israël aurait entamé des recherches et des contacts en Syrie, notamment dans le camp palestinien de Yarmouk, au sud de Damas, pour retrouver la tombe de l’espion pendu sur la place Merje, située au centre de la capitale syrienne, le 18 mai 1965. Depuis, sa dépouille aurait changé trois fois d’emplacement.
Les gouvernements syriens successifs ont à plusieurs reprises changé l’endroit de la tombe après les tentatives du Mossad de l’identifier. On pense que la dernière fois qu’[Eli Cohen] a été re-enterré, c’était du temps de l’ex-président Hafez al-Assad. L’opération s’était déroulée dans le secret le plus absolu et seulement trois officiers étaient au courant, tous décédés depuis, dont l’ex-ministre de la défense Mustapha Tlass.
Eli Cohen, ou l’agent 0088, avait réussi à infiltrer – sous une fausse identité, Kamel Thabet, un riche et festif exilé de retour à Damas – les plus hautes sphères du pouvoir syrien entre 1961 et 1965, et aurait influé, via les précieux renseignements qu’il envoyait à ses chefs du Mossad, sur le cours de la guerre des Six Jours. L’agent secret a surtout réussi à dévoiler le projet syrien de détournement du cours du Jourdain pour priver Israël de sa principale ressource en eau.
En plus de ses relations haut placées, qu’il invitait à des soirées alcoolisées à son domicile, Eli Cohen animait même une émission à la radio pour la diaspora syrienne. La rumeur à Damas le donnait même… futur ministre de la Défense !
Il est fort probable que Israël pourrait solliciter et interroger des Damascènes et des membres des minorités chiites et alaouites, qui peuvent aider au rapatriement de la dépouille de l’agent du Mossad.
À vrai dire, selon la dernière évaluation du Mossad, le plus probable est que les Syriens l’ont tant de fois déplacé qu’ils ne savent plus où il est, notamment vu les bouleversements récents dans le territoire contrôlé par les forces de l’Hayat Tahrir al-Cham.
Profitant du chaos de la guerre en Syrie depuis 2011 et de la fuite de certains hauts officiers de l’armée d’Assad, le Mossad a tenté plusieurs fois de percer le mystère. En vain. En 2019, Netflix a diffusé une série retraçant son parcours, The Spy
Seule consolation : en juillet 2018, le Mossad a annoncé avoir récupéré la montre que portait Eli Cohen pour la rendre à sa famille sans préciser comment, mais très vraisemblablement en la payant au prix fort auprès d’un antiquaire.
Alors que l’agent 0088 est toujours introuvable, il semble que les efforts se concentrent dans le camp de Yarmouk, avec un autre objectif : poursuivre aussi les recherches pour retrouver les dépouilles de deux soldats israéliens Yehuda Katz et Tzvi Feldman, portés disparus depuis la bataille de Soultan Yacoub entre l’armée syrienne et l’armée israélienne dans la plaine libanaise de la Bekaa en juin 1982. Les combats avaient fait 21 morts et plus de 30 blessés côté israélien.
En 2019, la dépouille de Zachary Baumel avait été retrouvée par les troupes russes dans un cimetière dans le camp de Yarmouk. Son corps a été remis par le président russe Vladimir Poutine au Premier ministre israélien Benyamin Netanyahu.
Les groupes rebelles, ceux-ci soutenus par la Turquie, ont intérêt de collaborer pour trouver les 2 autres soldats si ils veulent avoir plus de légitimité sur la scène internationale selon la fille de l’espion, Sophie Ben-Dor.
Souhail Ftouh