Par Ftouh Souhail

Le contrôleur de l’Etat d’Israël, Micha Lindenstrauss et le responsable polonais des droits du citoyen ont tenu ensemble en Pologne cette semaine un congrès spécial pour signaler les 60 ans de la déclaration de l’ONU des Droits de l’Homme. Le principal intervenant était l’ancien président de la Cour suprême d’Israël, le professeur Aharon Barak.

Ce Congrès relève  pour nous un double intérêt ; il marque deux  éventements importants, à savoir, celui du  soixantième anniversaire de création de l’Organisation Onusienne mais aussi  le soixantième anniversaire de la résurrection d’Israël.

La participation  du professeur Aharon Barak, ancien  président de la Cour suprême d’Israël,  est un  signe hautement significatif  dans ce congrès pour signaler les 60 ans de la Déclaration de l’ONU des Droits de l’Homme. Soixante  années de lutte incessante pour bâtir la paix et l’avenir de nos nouvelles générations. Soixante ans de combat pour assurer la pérennité de l’existence  d’un Etat de droit.

On connaît l’attachement de la Cour suprême d’Israël à l’égard du respect de l’Etat de droit, même face au terrorisme, attitude qu’avait notamment tenu à souligner, à différentes reprises, le juge Aharon Barak, qui présida cette haute instance de 1995 à 2006.

Un arrêt rendu le 11 juin 2008 (Anonyme c. Etat d’Israël, – 6659/06) se situe dans ce droit fil. Curieusement, c’était la première fois que la Cour Suprême avait à se prononcer sur la constitutionnalité de la loi sur l’incarcération des combattants illégaux adoptée, par la Knesset, en mars 2002. Cette loi permet la détention de « combattants illégaux », définis comme étant des personnes qui participent soit directement soit indirectement à des actes hostiles à l’égard de l’Etat d’Israël ou qui sont membres d’une force se livrant à de tels actes. De ce fait ces personnes ne peuvent pas se prévaloir de l’article 4 de la Troisième convention de Genève de 1949 sur le statut des prisonniers de guerre.

Rappelons que selon cette disposition de droit international, sont, notamment, considérés comme prisonniers de guerre, et soumis au régime édicté par ladite convention, qui interdit leur emprisonnement :

1) les membres des forces armées d’une Partie au conflit, de même que les membres des milices et des corps de volontaires faisant partie de ces forces armées ;

2) les membres des autres milices et les membres des autres corps de volontaires, y compris ceux des mouvements de résistance organisés, appartenant à une Partie au conflit et agissant en dehors ou à l’intérieur de leur propre territoire, même si ce territoire est occupé, pourvu que ces milices ou corps de volontaires, y compris ces mouvements de résistance organisés, remplissent les conditions suivantes :

a) d’avoir à leur tête une personne responsable pour ses subordonnés
b) d’avoir un signe distinctif fixe et reconnaissable à distance
c) de porter ouvertement les armes
d) de se conformer, dans leurs opérations, aux lois et coutumes de la guerre

L’affaire concernait deux habitants de Gaza détenus en raison de leur association supposée avec le Hezbollah en janvier 2002 et janvier 2003. Examinant le contexte de la Loi, la Cour Suprême ne pouvait que constater que celle-ci entendait considérer comme « combattant illégal » une personne qui « appartient à une organisation terroriste qui agit conte la sécurité de l’Etat d’Israël ».

A l’argument selon lequel, le droit humanitaire international ne reconnaîtrait pas de catégorie spéciale de « combattant illégal », la Cour a rappelé qu’elle s’était déjà prononcée sur ce point dans l’affaire Comité public contre la torture en Israël c. gouvernement d’Israël, dans laquelle elle a considéré que le terme de « civil » est antinomique de « combattant ».

On sait que, par ailleurs, la Cour a, déjà, admis en diverses circonstances – ce qui n’était pas évident du fait de la situation particulière des Territoires, qui ne relevaient d’aucune souveraineté légitime avant 1967 – l’applicabilité de la Quatrième convention relative au statut des populations civiles résidant dans des territoires occupés.

Aussi, relève-t-elle que plusieurs articles de cette Convention permettent l’internement de civils, mais seulement lorsque c’est « absolument nécessaire » pour la sécurité de la puissance qui les détient, à la condition que cela résulte d’une procédure judiciaire ou administrative (article 42) et sous réserve d’un contrôle au moins biannuel de la nécessité de cette détention (article 43).

Mais, parce que la Cour considère que la détention administrative est une mesure inhabituelle et extrême, qui porte atteinte au droit constitutionnel de la liberté personnelle, elle demande à l’Etat de démontrer de manière claire et évidente qu’une menace certaine contre la sécurité en justifie l’usage. Il faut plus comme preuve qu’un seul élément tiré d’un événement isolé.

Mais l’Etat doit prouver que le détenu a pris une part réelle aux hostilités et les mesures de détention doivent périodiquement être réexaminées et pouvoir faire l’objet de recours. Selon la Loi, une détention ne peut se poursuivre indéfiniment et doit être examinée au cas par cas.

On ne peut que regretter que les  grands médias , si prompts à mettre en cause le comportement d’Israël et à l’accuser de bafouer le droit international, n’aient pas songé à faire écho à cette décision, dont nous avons trouvé la recension dans le Bulletin de la Société américaine pour le droit international (International Law in Brief du 18 juillet 2008).

 

Ftouh Souhail, Tunis

Juriste/Citoyen du monde

0 0 votes
Évaluation de l'article