Le president de la République du Tchad Idriss Deby 

L’engagement dans la lutte contre le terrorisme apporte une reconnaissance d’Israël en Afrique. Tout près de Ndjamena, des négociations secrètes débutent depuis trois mois entre Israël et le Tchad. Ce dernier cherche l’expérience israélienne dans la lutte contre le terrorisme, car La Libye qui se débarrasse de ses terroristes les envoie au Tchad et à l’est du Niger. La lutte contre le terrorisme recouvre surtout, le nord et l’ouest du pays. 

Une délégation israélienne s’est rendue cette semaine au Tchad, pays d’Afrique centrale, pour des entretiens sur la possibilité de renouer des relations diplomatiques. Ce pays à majorité musulmane a coupé ses relations avec Israël dans les années 1970.

Les entretiens secrets ont été menés par un dirigeant de l’Agence de sécurité israélienne (Shin Bet), Meir Ben Shabat, qui travaille comme envoyé spécial dans les mondes arabe et islamique. Du coté tchadien, on parle du fils du président, qui a déjà contacté l’homme d’affaires français Philippe Solomon et le rabbin Abraham Moyal à ce sujet.

Jérusalem considère les contacts avec le gouvernement tchadien comme une avancée diplomatique avec un grand État musulman d’Afrique centrale. Des rapports israéliens ont indiqué que le président tchadien Idriss Deby Itno souhaitait établir des relations avec l’état hébreu garantissant le succès de ses efforts pour lutter contre les djihadistes venant de la Lybie.

Cela serait bénéfique pour Israël en transformant le Tchad en un pont israélien pour normaliser les relations avec d’autres pays musulmans du continent tels que le Mali et le Niger.

En septembre 2017, le directeur général du ministère des Affaires étrangères, Dore Gold, s’est rendu dans le pays pour des entretiens. Une déclaration ultérieure du ministère israélien des Affaires étrangères a expliqué que le Tchad “traite du terrorisme islamiste radical” et occupait alors la présidence tournante de l’Union africaine.

Un attaché militaire israélien a été nommé en Éthiopie et au Kenya, tandis que Benjamin Netanyahu a présenté un plan
pour établir une alliance entre Israël et les pays comme  (Éthiopie – Ouganda – Kenya – Rwanda).

Les objectifs d’Israël en Afrique sont aussi d’ordre sécuritaires. Le domaine de la sécurité est particulièrement propice à la collaboration.

Au Sahel, épicentre des activités des groupes terroristes, des sociétés privées partagent avec les États la protection des biens et des personnes. De la vidéo-surveillance à la géolocalisation en passant par la cybersécurité, la protection rapprochée, l’exfiltration, convoyages de fonds voire le renseignement privé, les sociétés de sécurité privée comme West Africa sécurity, G4S, Black Hawk, sont désormais en première ligne, dans la lutte contre le terrorisme.

Israël veut aussi sécuriser la communauté juive du continent, qui est un centre de pouvoir et d’influence en tant que l’un des canaux importants sur lesquels Israël compte.

Business de la sécurité privée

Une firme israélienne compte la création d’un nouveau centre de formation afin de faire face à la demande en sécurité privée au Niger, pays confronté aussi aux risques d’infiltrations terroristes sur trois frontières : nord-ouest avec le Mali, sud-est avec le Nigéria et nord avec la Libye. En Côte d’Ivoire, le nombre de sociétés privées de sécurité a tellement explosé que leurs propriétaires se sont regroupés en syndicat dénommé Union patronale des entreprises de sécurité privée de Côte d’Ivoire (UPESP-CI).

Dans de nombreux pays de la region, ces sociétés disposent d’équipements et proposent de niveau de rémunération qui rendent envieux policiers, gendarmes et militaires. En effet, à Niamey, Abidjan, Ouagadougou, Nouakchott ou N’Djamena, leurs sièges sont reconnaissables aux moyens technologiques modernes qui les équipent: caméras de surveillance, antennes satellitaires, parcs automobiles flambants neufs dotés de toutes les gammes de véhicules d’interventions et de secours équipés de gyrophares.

En villes, leurs agents sont identifiables à leurs uniformes réglementaires soignés, à leurs brassards, leurs talki-walki ou leurs déplacements sur des motos d’interventions rapides. Alors qu’il affiche une croissance annuelle de plus de 10% actuellement, le secteur de la sécurité privée est appelé à se développer tant que la menace terroriste persistera en Afrique. Il peut continuer de prospérer longtemps pour répondre à la demande de plus en plus forte d’une clientèle institutionnelle ou privée qui ne compte pas son budget sécurité.

Aux agents de police ou de gendarmerie mis à leur disposition par les pays d’accueil, les chancelleries occidentales, cibles principales des groupes terroristes, ajoutent désormais le recours aux prestations des sociétés privées de sécurité. Ces mêmes structures assurent presque partout dans les Etats du G5 Sahel (Burkina Faso, Mali, Mauritanie, Niger et Tchad) la protection des bureaux de l’Union européenne, des ambassades des Etats-Unis, d’institutions internationales comme la Banque africaine de développement, l’Union africaine et des multinationales parmi lesquelles Areva, Sogea-Satom, Toyota, Eiffage, Bolloré Logistics.

Il s’y ajoute les hôtels de grand standing (Radisson Blu, Sheraton, Hilton) et les grandes ONG internationales comme la Croix rouge (CICR), Médecins sans frontières (MSF), OXFAM, Caritas, Care International. Même la force française Barkhane et la mission multidimensionnelle des Nations unies pour la stabilisation du Mali (MINUSMA) et le Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) n’hésitent pas parfois à sous-traiter aux sociétés privées de sécurité la surveillance de certains de leurs locaux.

La Libye repousse les fractions armées vers le Tchad voisin.

Le Tchad envoie des renforts militaires à la frontière avec la Libye. Le gouvernement d’Idriss Déby fait face à une arrivée massive de combattants de bandes armées depuis la Libye. Des avions ont été basés à Faya Largeau [48.000 habitants, au nord du Tchad] et plusieurs convois de matériel militaire ont été envoyés depuis la capitale N’Djamena,vers le nord.

Si le maréchal libyen Khalifa Haftar pacifie peu à peu la Libye, les terroristes et autres bandes armées plus ou moins criminelles sont peu à peu repoussées vers le Tchad où la situation empire. Ces combattants n’ont rien de différent de leurs collègues syriens passent à travers la frontière avec la Libye.

Le Conseil de Commandement Militaire pour le Salut de la République (CCMSR) a pour objectif de renverser le president tchadien Idriss Déby. Le groupe revendique 4500 hommes armés, et s’il a été créé en 2016, il a commencé à affronter l’armée régulière depuis le mois d’août 2018.  Des combattants libyens  rejoignent le CCSMR.

Le maréchal Haftar aurait aussi recours à une importante force tchadienne – près de 6000 hommes basés dans le sud de la Libye, à Sebha (Fezzan) – pour le pacifier. Le CCSMR en a fait partie – avant d’opter pour les Brigades de défense de Benghazi, une branche locale d’Al-Quaïda. Un rapport des Nations Unies, qui estime le nombre de mercenaires tchadiens en Libye à 4200 hommes, les a accusés ce 9 juin de combattre aux côtés des islamistes.

Le 22 août 2018, un check-point de l’armée tchadienne à la frontière de la Libye a été attaqué par des bandes armées venues du désert libyen. Le 11 août, d’autres hommes armés, issus du Conseil de Commandement Militaire pour le Salut de la République, un mouvement armé d’opposition, ont tué trois militaires tchadiens à Kouri Bougoudi, 35 km au sud de la frontière ; les rebelles, partis depuis la Libye, ont affirmé avoir investi la ville et fait plusieurs prisonniers dans l’armée régulière

Le Tchad est devenu un maillon indispensable de la lutte contre le terrorisme. Si le régime tchadien tombe, la France perdra un appui militaire solide contre la déstabilisation de l’Afrique de l’ouest (Centrafrique, Boko Haram, Barkhane – dont les forces aériennes sont basées à Ndjamena et Faya-Largeau est une des bases avancées) et le pays risque de tomber comme un fruit mûr entre les mains des islamistes. Avec comme conséquence quasi-immédiate un exode de la population vers les pays voisins… mais aussi un accroissement net de l’immigration vers la France, via la Libye et la Tunisie, puis l’Espagne.

Souhail Ftouh 

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